Loin des yeux, près du cœur
Décidément, le métro parisien est une source infinie de sujets de conversation, un tonneau des Danaïdes de situations cocasses. Hier encore, après avoir passé sur ma ligne chérie trois fois plus de temps pour le trajet habituel, me voici debout sur la seconde à regarder autour de moi. Juste devant se tient un jeune homme affichant une petite trentaine, grand, des lunettes aux verres minces, une écharpe roulée en boule dans la poche droite de son loden. Il tient avec ses deux main un rectangle de papier blanc plié en deux d'une quinzaine de centimètres de long sur cinq ou six de large. De temps en temps je le vois ouvrir le morceau de papier et l'approcher à deux centimètres de ses yeux. Dans le reflet de la porte je le vois cligner des yeux plus rapidement. Que fait il au juste ? La première fois je pensais qu'il ne voyait pas grand chose et avait besoin pour lire de cette faible distance d'avec ses yeux. Et puis c'était trop fréquent, si quelque chose était écrit il devait maintenant le savoir par cœur. S'adonnait il à la résolution d'une énigme optique ? Détective, était il à la recherche d'un indice caché dans le papier ?
Je n'aurais pas eu le temps de lui demander, à la station suivante il est descendu en un clin d'œil.