Vision surréaliste
La journée enfin terminée, encore une qui n'a pas fait
loin de dix heures, je sors tout guilleret de mon entreprise, tout
content d'entrer dans une phase de week-end que j'attends depuis au
moins une semaine, quand tout à coup, quelques sons musicaux viennent
heurter mes tympans. Qu'ouï-je ? de la musique dans cette ville
laborieuse ? Je m'approche, intrigué par cette incongruité dans la
direction de la source sonore et là, que vois-je ? Quatre hurluberlus
tout de noir vétus, chapeau melon sur le chef, grosses lunettes
cerclées de noir autour des yeux, un pantalon finissant avec peine au
milieu du mollet, de magnifiques bottillons rouges en guise
d'escarpins, marchant en file indienne dans l'ordre de leur taille,
marquant de leur pas le rythme de leur musique, en tête un saxophone
soprano, venant ensuite un saxophone ténor, suivi d'un saxophone
baryton, la marche se fermant par une caisse claire. Ils vous
ballançait, mine de rien, un jazz genre free des années soixante, en ne
se souciant, apparemment pas des passant qui erraient sur les
trottoirs, ne faisant attention, tout en jouant parfaitement ensemble,
à ne pas se faire renverser par une voiture lors d'une traversée
périlleuse.
Cette manifestation musicale, malgré un ciel gris prêt à fondre sur nous, donnait un air de fête à tout le quartier.
QuoiQue:
ils semblaient clowner musicalement dans une indiférence générale!
Seuls, à la fin de mon parcours et, peut être, du leur, quelques
enfants qui jouaient écarquillèrent leurs yeux encore innocents.
J'aurais aimé rester plus longtemps à regarder ce spectacle qui, à
l'échelle microcosmique était d'une bouffonnerie formidable et à celle
de cette place de la région parisienne, d'une tristesse considérable.
Décidément, l'humanus parisianus m'a encore déçu.