La parole à distance
Si ma journée de dimanche fut faste, remplie de repos bien mérité, d'expériences culinaires réussies et de promenades champètres délassantes, elle fut aussi émaillée de rencontres curieuses, de croisements étonnants, de confrontations avec le monde moderne me mettant le sourire à la bouche et la consternation à l'esprit.
Ainsi, en sortant du parc départemental de la Courneuve, y avait il le dernier des dix jours du cheval avec son ambiance fin de salon et ce cavalier, seul au milieu de la prairie, en train de parler à son téléphone mobile.
Ah, le téléphone mobile, l'outil devenu indispensable et, comme tout outil qui se respecte, utilisé à tort et à travers, aussi bien pour demander son chemin, des nouvelles d'un proche que la marque de dentifrice à acheter au supermarché; joies que cet outil qui nous permet, à nous pauvres passants, de profiter des conversations privées des uns et des autres, des amours naissantes et des brouilles définitives.
Comme cette jeune femme croisée peu auparavant, tendue entre la poste et le commissariat de police, toute habillée de rose et hurlant ses phrases à son parallépipède de plastique "mais toi tu te drogues", "ton lecteur de DVD, mais quel lecteur, c'est mon lecteur", "vas y, suicide toi, jette toi par la fenêtre", l'objet n'étant plus alors collé à l'oreille mais tenu fermement devant la bouche, comme pour mieux invectivé son correspondant.
Etant donné les décibels projetés, nous avons pris quelques distances avec la personne qui faisait se retourner tous les piétons à proximité et avait même fait sortir un agent de la force publique de son usine. En d'autres temps, cette conversation aurait eut lieu au pire dans une cabine publique, cabine fermée par des portes empêchant de tenir tout le quartier au courant.
Le problème n'est pas nouveau si j'en juge par les traces historiques glanées ici ou là, comme cette peinture de Degas ou cette sculpture sur une église de Luca.