Les yeux qui parlent
Il y avait cet homme, très grand, très maigre, très noir de peau, un guerrier Massaï sans sa lance ni son sourire, la chemise sans vraie couleur, les autres vêtements dépareillés signes d'un grand dénuement. Il venait d'entrer dans la rame du métro en baissant sa tête, courbant sa carcasse pour la faire entrer en entier, participant à la grande compression du matin.
Peu après, une petite sonnerie égrenait ses petite notes et notre homme prenait son téléphone paraissant un vrai jouet dans ses mains de géant. Mais la conversation semblait difficile, il s'exprimait dans un français hésitant et son interlocuteur ne paraissait pas faire beaucoup d'efforts. Soudain, n'arrivant pas à se faire comprendre, il tendait son appareil vers l'homme qui dépassait, le plus grand de la rame, celui à la même hauteur, en lui demandant de répondre.
Il y avait cette jeune femme, les cheveux mi longs tendus en arrière et maintenus par un élastique. Elle se tenait là attendant de pouvoir sortir à sa station, subissant comme les autres les affres de l'affluence quotidienne. En voyant le manège de notre géant perdu, sa façon de résoudre son problème, elle avait du mal à se retenir, elle pouffait par intervalle. Quand nos regards se sont croisés, elle a laissé son rire résonner.
La journée commençait bien.