C'est le bouquet! - Introït
Métro Duroc. Pour une fois, il n'y a pas trop de monde sur le quai. L'indicateur affiche un joyeux vingt clignotant montrant cette fois-ci son inefficacité. Etienne se tient debout, plutôt à l'arrière du quai, le col de son manteau bien remonté cachant partiellement son menton, pour tenter de faire barrage au courant d'air glacé venant de la sortie. Il a ses deux mains dans ses poches et reste l'air songeur à regarder une souris grise passer sous les rails, allant et venant, attirée irrésistiblement par un sac en plastique abandonné par un voyageur mais dont les mouvements par l'air brassé provoque sa crainte.
Il ne pense à rien; il tente d'oublier sa journée de travail sans aucun intéret; il essaie de faire le vide dans la perspective de son samedi réparateur; il laisse fuir les soucis et les embrouilles; il attend.
Quand la rame déboule dans la station, il a juste le temps de reculer d'un pas, sentant le souffle de l'air brutalement déplacé sur son visage et les lumières des voitures papillonner devant ses yeux.
C'est à ce moment que Rachida, après avoir descendu les dernières marches d'un air alerte s'approche de lui. Ses longs cheveux noirs aux reflets roux un brin emmelés, les derniers boutons de son manteaux ouverts donnent à voir une certaine précipitation dans sa démarche, une décision rapide. Sa lêvre supérieure est perlée de fines gouttelettes de sueur; ses yeux noirs brillent; elle tend à Etienne un gros bouquet de roses mêlées jaunes et rouges; elle dit "cadeau!", offrant en prime son sourire radieux.