Campagne anglaise
Le pavé est impressionnant, plus de mille pages imprimées en petits caractères. Pourtant non seulement il se lit bien, mais on a du mal à s'en détacher, y compris quand on le referme après la dernière phrase.
Middlemarch raconte une tranche de vie d'un ensemble de personnages vivant au même moment dans un même lieu, une petite bourgade de Grande Bretagne vers les années 1830. On y voit des jeunes femmes emprisonnées dans leur éducation bourgeoise étriquée, d'autres qui tentent d'en sortir et se heurtent à la mesquinerie masculine; on y voit des jeunes hommes idéalistes essayant de faire changer les modes de vies, politiquement, humainement, ils seront rejetés par le microcosme des élites de la ville, obligés de fuir pour survivre. On y voit partout le poids de la religion et de l'éducation dans les modes de vie et de réflexion de l'ensemble de la population, les personnes qui en souffrent et ne font rien pour que ça change.
En fait, pour être exacte, le volume du roman permet de marquer cette fêlure dans le système, le moment ou certaines personnes de la nouvelles générations refusent l'ordre établi, le remettent en cause et brave la "sagesse" des anciens. Car le roman n'est pas noir comme certains du même auteur (de la même auteuse, soyons précis) ou comme ceux de Thomas Hardy peuvent l'être. Un espoir est visible, on peut être optimiste sur le devenir des quelques personnages principaux, le dernier chapitre avant l'épilogue est même un peu trop hollywoodien à mon goût, trop heureux pour être honnête; on ne pouvait s'attendre à une fin si heureuse après le déroulement des aventures de chacun, un peu comme si Mary Ann Evans, le vrai nom de George Eliot, avait voulu se faire pardonner d'avoir brosser un tableau si sombre.
Etant donné le plaisir que m'a donné cette lecture, il ne me reste plus qu'à me procurer ses six autre romans.